lundi 25 octobre 2010

Situation du Marché du lait de collecte au mois de septembre 2010

Le secteur laitier tunisien se porte-t-il bien ?

La réponse est affirmative au vu des chiffres relatifs au marché du lait de collecte (le lait transitant par les centres de collecte) qui sont à mon sens les plus fiables tant que la subvention de collecte et de réfrigération est calculée sur la base de ces données.

A la fin du mois de septembre environ 501 000 000 L ont transité par le circuit des centres de collecte contre 466 000 000 L durant la même période de 2009 (+7,6% soient 35 000 000 L en plus). Durant le mois de septembre nous avons enregistré la plus forte croissance (+15,8% soient 1 633 000 L/j en septembre 2010 vs. 1 410 000 L/j en septembre 2009) (GIVRLAIT 2010)

Ce boom laitier dont nous avons parlé précédemment (c.f. la note publiée sur ce site le 19/04/10) provient de l’effet additif de plusieurs facteurs : i) les révisions successives des prix à la production survenues depuis septembre 2007, ii) la révision du plafond de la collecte de 5 000 000 L par centre de collecte et par an à 7 000 000 L par centre et par an, iii) une migration du lait du secteur informel vers le secteur organisé et iv) mais avec des proportions moindres une utilisation frauduleuse du lactosérum.

Cependant il ne faut pas oublier l’autre revers de la médaille : un stock énorme du lait de boisson causé entre autre par un fléchissement de la consommation. Ce fléchissement pourrait être expliqué en partie par i) une saison touristique en deçà des prévisions (et pour cause la survenue du mois de ramadan durant la saison estivale et ii) le dépassement du prix psychologique de plus du 1 Dt le paquet du lait

Comme nous l’avons prévu (c.f. note publiée sur ce site le 01/09/10) la quasi-totalité des opérateurs laitiers ont répercuté leurs difficultés de déstockage sur leur activité d’achat et de réception de lait cru ce qui a engendré beaucoup de pertes chez les centres de collecte. Evidemment si on veut voir la bouteille à moitié pleine, ces mesures ont permis d’avoir un lait cru d’une qualité physico-chimique presque «irréprochable» (la qualité microbiologique du lait cru tunisien sera discutée ultérieurement)

Le ministère de commerce a attribué un quota pour l’exportation de 3 000 000 L de lait pour tous les opérateurs laitiers (lait de boisson) mais cette mesure qui reste louable ne résout pas le problème de ces opérateurs. Le marché algérien reste inaccessible et le marché libyen connaît l’hégémonie des produits laitiers (toutes catégories confondues) égyptiens mais l’atout de nos produits reste une qualité nettement supérieure pour des prix équivalents. Ces démarches de prospection demandent du temps qui ne joue pas en faveur des différents opérateurs.

Le dénouement de cette crise influencera positivement ou négativement la prochaine lactation qui s’avère déjà difficile à cause de la spéculation sur les marchés des différents aliments concentrés simples.

samedi 4 septembre 2010

Fourrages grossiers et aliments concentrés simples : Risque de pénurie ou prémices d'une spéculation? Recommanndations.

Un article publié ce matin par le quotidien "Assabah" a attiré on attention par son contenu alarmiste prédisant un scénario catastrophe rappelant la crise du lait à la fin 2007 et au début de 2008 avec son lot d'abattage de troupeau, d'inflation (augmentation significative des aliments concentrés, trois augmentations au niveau du prix minimum garanti du lait cru à la production,...).

A mon sens une répétition de ce scénario est peu probable même si des augmentations des prix des fourrages grossiers et des aliments concentrés sont fort probable, mais de telles augmentations seraient inférieures aux niveaux atteints en 2007 et 2008.

Les analystes de la FAO sont unanimes quant aux tensions que pourraient connaître les marchés des céréales et des oléagineux, mais ces tensions ne risqueraient pas d'entraver l'équilibre entre l'offre et la demande. Nous serons loin par exemple des 800 $ la tonne de blé et des 400 $ la tonne d'orge (arrivée ports de Tunisie). Les prix de ces céréales pourraient de stabiliser autour de 300 $ et 180 $ la tonne (c.f. www.fao.org). Si des mesures provisoires sont légiférées afin de suspendre par exemple la TVA sur les aliments concentrés (à titre d'information ces aliments représentent entre 50 à 60% de la ration des bovins laitiers en Tunisie), nos éleveurs ne risqueront pas de connaître des jours difficiles.

De ce fait, une diminution de la production et de la collecte du lait seraient peu probable. En effet, les prix pratiqués actuellement eu niveau de l'amont laitier permettent de sauvegarder une bonne marge opérationnelle pour les éleveurs. Je tiens à rappeler que ce prix (580 millimes/L au minimum) est supérieur aux prix pratiqués par exemple en France (entre 520 et 540 millimes/L) pour un qualité incomparable.

Et la spéculation alors?

A l'approche de la basse saison de production (de septembre jusqu'à janvier) la rengaine sur l'abattage ou le transfert transfrontalier des bovins laitier est reprise par les collecteurs de lait pour espérer des augmentations de prix, pour camoufler une vente directe de lait cru, ou légitimer le frelatage du lait.... Et comme par hasard la lait coule à flot une fois on atteint le mois de février.

A mon sens, la mise en place d'une stratégie pour parfaire la production nationale céréalière doit englober aussi la restructuration de l'élevage laitier et de la production fourragère. Le système actuel de production laitière et de la collecte a atteint ses objectifs mais il a montré aussi ses limites.

Je m'explique

On recense plus de 110 000 "éleveurs" ou dont la plupart sont des pseudo-éleveurs qui manquent de qualification pour conduire correctement un élevage même de moins de 5 vaches. La plupart de ces micro-troupeaux souffrent de mammites subcliniques, d'acidose latente, et d'autres maladies métaboliques... Assurer un encadrement et une formation à toute cette population est une tâche titanesque même si tous les opérateurs émettent une volonté pour la réaliser...

L'autre problème de taille est l'élevage laitier hors-sole qui sévit dans les régions du centre littoral, du centre steppique et du sud est (excepté la cas particulier de Gabès). Ce type d'élevage couplé aux contraintes citées dans le paragraphe précédent est très sensible à toute modification des cours des fourrages grossiers et des aliments concentrés simples. Pour combien de temps nous verrons encore les gouvernorats de Mahdia et de Sfax devançant les gouvernorats de Jendouba, Béjà et Bizerte en terme de collecte de lait? Pour combien de temps cautionnerions nous une telle aberration?

Une stratégie sur 10 à 15 ans est à réfléchir afin de permettre le passage vers un système de production basé sur des exploitations laitières spécialisées et viables.

Mon scénario favori?

Mettre les 40 000 ha irrigués de la plaine de Bousalem, les 10 000 ha de la plaine hydromorphes de mabtouh via la mise en oeuvre de travaux de CES, les 30 000 ha des prairies de séjenène pourront facilement abriter 160 000 Prim'Holstein. Aux décideurs de voir la taille optimale des troupeaux (économiquement parlant) et de faire les comptes (coûts de reconversion des 95% des pseudo-éleveurs vers d'autres vocations....).

Je serai plus proléfique dans de prochaines notes

mercredi 1 septembre 2010

Destockage du lait de boisson : Le salut viendrait-il avec la rentrée scolaire ou avec des exporations ciblées ?

Comme nous l’avons mentionné dans une note précédente (c.f. : Stock technique de lait de boisson) le ministère de commerce a réglementé cette année les opérations de stockage et de destockage de lait de boisson afin d’éviter toute pénurie. L’objectif initial de stocker environ 50 000 000 L a été dépassé de 20% pour atteindre le niveau de 60 000 000 L.

Cependant cette intention louable pour éviter la pénurie a engendré d’autres problèmes. Tous les opérateurs de l’industrie de lait de boissons peinent pour liquider leurs excédents de stocks et ce pour diverses raisons : mévente à cause d’une mauvaise qualité, mévente à cause de problèmes logistiques, blocage de la réception afin d’éviter l’alimentation de stock avec le risque de perdre des fournisseurs de lait cru,…

Par ailleurs, un ralentissemnet de la consommation de lait a été évoqué : saison touristique écourtée par la survenue du mois de ramadan durant le mois d’août, changement des habitudes alimentaires durant la saison estivale,…

L’incidence financière de ce lent rythme de destockage peut être préjudiciable pour les opérateurs de l’industrie de lait de boisson. L’allongement de la rotation de stock au-delà de 60 jours entraîne des pertes considérable au niveau du produit fini, et pour cause la qualité microbiologique initiale du lait cru parvenant aux laiteries et qui oscille aux alentours de 107 colonies/mL en moyenne. Cette charge microbienne avec son lot de pathogènes, de sporulés et d’enzymes thermorésistantes se retrouvent malgrés la dégermination et la stérilisation UHT dans les produits finis. Par conséquent la stabilité de notre lait UHT est compromise au bout de 45 à 60 jours. A vous d’imaginer le montant des pertes à cause d’un allongement de la rotation du stock.

La solution ?

A priori tous les opérateurs espèrent accélérer le destockage de leurs stocks de lait UHT avec la reprise de la consommation qui accompagne habituellement la rentrée scolaire. Si ce scénario ne se réalise pas des autorisations pour l’exportation doivent être accordées par les autorités de tutelle aux opérateurs de l’industrie de lait de boisson. La fixation du prochain stock pour l’exercice 2011 doit être mûrement réfléchi afin de palier à lafois les intérets des consommateurs mais aussi les intérêts des opérateurs laitiers

jeudi 13 mai 2010

Record de collecte de lait en avril 2010

En reprenant les données relatives du marché de la collecte de lait depuis une décennie, on constate que le record d'avril 2009 (1 966 667 L/j) a été dépassé de +3,4% en avril 2010 (2 033 774 L/j). Cette croissance confirme ce que j'ai publié dans une précédente note (Boom Laitier en Tunisie) concernant les croissances enregistrées durant les mois de janvier et février 2010 (respectivement +14,1% et +10,6%) comparés aux mêmes mois de l'année 2009, qui camouflent à mon sens une qualité médiocre du lait cru ou ce qui ressemble à du lait cru (utilisation excessive et abusive de lactosérum).

Par ailleurs une corrélation positive existe entre la croissance annuelle des mois de mars et avril et la croissance année n vs année n-1. De ce fait, si tout va bien on aura le transit d'environ 21 000 000 L en plus par le réseau de collecte comparé à 2010 dont environ la moitié a déjà transité par ce circuit entre les mois de janvier et d'avril.

assisterons-nous durant les prochains mois à une occupation quasi-complète de l'outil industriel durant la phase la plus critique de l'année? Les prochains mois nous en diront plus

jeudi 6 mai 2010

Stock Technique de lait de boisson

Comme chaque année la décision du ministère du commerce relative à la constitution d’un stock de régulation du marché en lait de boisson vient de paraître dans le JORT (40 000 000 L au 31/07/10). Cette initiative louable permet de réguler le marché durant la période de basse production (de septembre jusqu’à janvier) et permet d’éviter l’importation du lait de boisson pour contrecarrer la pénurie qui accompagne généralement cette période.

Pour parfaire cette stratégie de stockage le ministère du commerce a assigné depuis quelques années des quotas de stockage à chaque laiterie fabricant du lait de boisson. Ces quotas sont proportionnels aux parts de marché de chaque marque. Par ailleurs, il a assigné des niveaux de stocks mensuels qu’il veille rigoureusement à leur application. Et comme ces mesures restaient insuffisantes, on a assisté aussi dans le passé à la mise en place de certaines mesures interdisant la fabrication de sous produits (yaourt, lait fermenté, lait entier, lait écrémé, lait enrichi,…) afin de diriger tout le lait parvenant aux quais de réception des laiteries à la fabrication du lait demi-écrémé.

Malgré toutes ces mesures draconiennes on a assisté durant la dernière basse saison de production à une pénurie de qualité et non pas de quantité. En effet, les consommateurs ont manifesté une forte demande pour deux marques en particulier et on parlait alors de pénurie chaque fois que ces deux marques se faisaient rares dans les étalages alors que des stocks énormes des autres marques remplissaient les mêmes étalages.

Que faire alors ?

La nouveauté cette année est que le ministère de commerce aura à superviser l’opération de déstockage chez toutes les laiteries. Chaque laiterie n’a plus la latitude de vendre librement ses produits vu qu’elle aura un niveau de stock mensuel à respecter sous peine de voir sa subvention de stockage et sa production de produits à forte valeur ajoutée confisquées.

Le paradoxe qui m’inquiète dans toute cette histoire est le suivant :

Pourquoi sévir au niveau du secteur organisé durant la basse saison de production et fermer les yeux sur les agissements d’un secteur informel qui ne connaît son apogée que durant la même période? Pourtant les textes législatifs interdisant la vente directe du lait cru sont explicites, les services du ministère du commerce n’auront qu’à appliquer la loi.

Pourquoi les chiffres relatifs à l’approvisionnement du marché durant cette période seraient plus importants que le pourcentage du frelatage et le nombre de germes pathogènes : brucellose, salmonellose, listeria, tuberculose,…que renferme le lait colporté de porte à porte ou destiné aux crèmeries des zones urbaines et péri-urbaines?

Ne serait-il pas plus judicieux de sévir auprès de ces colporteurs et permettre ainsi de rediriger plus de lait cru vers les laiteries, (environ 500 000 à 600 000 L/j de lait cru (ou ce qui ressemble à du lait cru) approvisionnent les crèmeries du Grand Tunis au mois de Ramadan) ?

A méditer

lundi 19 avril 2010

Boom Laitier en 2010 ?

Les données relatives au marché de la collecte du lait (selon GIVRLAIT, 2010) montrent des évolutions intéressantes que ce soit au niveau de la croissance annuelle (vs. La même période 2009) que ce soit au niveau de l’évolution mensuelle (intra 2010).

Pour le premier trimestre 2010 nous notons une croissance de +7,8% (+11 500 000 L) comparé à la même période de 2009.


Pour ce premier trimestre 2010, la croissance a été la plus importante durant le mois de janvier (+13,8% vs. janvier 2009, environ +200 000 L/j) et la plus faible durant le mois de mars (+1,8% vs. mars 2009, environ +32 000 L/j)


En l’absence des données objectives sur la qualité physico-chimique du lait collecté durant ce premier trimestre 2010, sur les normes d’acceptations appliquées par chaque laiterie, et sur le devenir du lait refusé par les laiteries nous ne pouvons qu’émettre des hypothèses (et qui sont strictement personnelles).


L’abondance du lait durant le mois de janvier est essentiellement due à une application laxiste des normes nationales d’acceptation de lait cru (frelatage excessif du lait, réinjection du lactosérum dans le lait cru,…) et un fléchissement au niveau de l’activité du marché informel.


La croissance enregistrée durant le mois de mars reflète à mon sens l’évolution réelle du marché de la collecte du lait surtout si on enregistre une croissance similaire durant les mois d’avril et de mai. Durant cette période, les laiteries, les centres de collecte, les colporteurs, les ramasseurs et les éleveurs sont très regardant quant à une qualité irréprochable du lait cru.


Un point fort à noter : ce boom au niveau du marché de la collecte du lait a trouvé cette fois-ci un réseau de collecte et de transport adapté à nos conditions climatiques et capable de le résorber.

jeudi 25 mars 2010

L'après l'agrément sanitaire?

La mise en place de l'agrément sanitaire au niveau des centre de collecte et des unités de transformation laitière représente un acquis considérable pour la filière lait en Tunisie et pour la préservation de la santé des consommateurs. Le respect de la marche en avant, de la séparation des flux, le nettoyage systématique des contenants de lait (bidons, citernes des camions, tanks de refroidissement et de stockage de lait) ont permis de modifier significativement "l'apparence" des centres de collecte et des unités de transformation de lait. Qu'en est-il au niveau de la matière première : le lait cru?

Les efforts des médecins vétérinaires (qui restent les premiers garant de la santé humaine) et des différents cadres du ministère de l'agriculture sont louables, néanmoins d'autres mesures cruciales auraient dû accompagner la mise en place de l'agrément sanitaire notamment : i) l'antibiothérapie anarchique des bovins laitiers et ii) l'interdiction pure et simple du colportage du lait au niveau du circuit primaire, que ce soit le colportage traitant avec les centres de collecte et/ou le colportage péri urbain traitant avec les crèmeries (commerce de lait cru et dérivés).

Eliminer (ou limiter) la présence de résidus d'antibiotiques dans le lait cru ne pourra se faire qu'en autorisant la vente directe de ces médicaments aux éleveurs uniquement sur présentation d'une prescription d'un médecin vétérinaire. Certes, cette mesure ne résoudra qu'en partie ce problème, néanmoins elle représente une étape indispensable. L'ordre des médecines vétérinaires, l'ordre des pharmaciens, la profession (producteurs, collecteurs, transformateurs) et les autorités de tutelle doivent collaborer pour solutionner le problème épineux de la libre circulation des antibiotiques et contribuer à la préservation de la santé du consommateur (allergie aux antibiotiques, antibio-résistance,...)

Le colportage du lait cru et sa vente directe au consommateur ou par l'intermédiaire des crèmeries représente aussi un danger potentiel pour la santé des consommateurs. Les germes pathogènes pouvant exister dans ce lait génèrent plusieurs maladies (brucellose, tuberculose, salmonellose,...). Or, ces germes pathogènes résistent à certains traitements thermiques (ébullition, pasteurisation) du lait et restent potentiellement dangereux. Certes le lait cru présente plusieurs avantages diététiques (présence d'anti-oxydants, vitamines,...) mais sa vente doit être repensée dans une logique n'incluant pas les colporteurs tels qu'ils procèdent actuellement (en dehors de tout cadre législatif et juridique)